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publie 14 janvier 2011

Alimentation : Les bobards

selon Serge Cottereau

Les super-bobards (!) sur le repas d’avant-course, sur l’alimentation pendant une épreuve, sur les gels, gateaux-sport et compléments alimentaires ...

En compétition, rien ne permet de réaliser mieux que 100 % de son potentiel du moment (sauf le dopage ! mais ce n’est pas l’objet de ce livre et, de toute façon, je n’aurais pas cette compétence). Mais il y a des produits qui, utilisés comme les marques nous les conseillent, permettent de réaliser... moins bien que ce que l’on vaut !

Exemple : les gels

Ce chapitre peut être considéré comme le plus important car ce qui m’a motivé à l’écrire est la nécessité de la dénonciation de leur totale inutilité et surtout de leurs inconvénients, de la diminution des capacités pour ceux qui les absorbent et des si nombreux problèmes digestifs qu’ils entraînent.

Pourtant, et c’est étonnant après les lignes ci-dessus,je n’ai rien contre la composition de ces gels. C’est plutôt qu’ils sont mal utilisés ; en trop grande quantité généralement (c’est l’intérêt du fabricant) et qu’ils peuvent être remplacés, avec une efficacité optimum, par des produits cent fois moins coûteux.

Il est d’abord nécessaire de rappeler des notions de base :

- Les carburants qui apportent l’énergie lors d’un effort, donc d’un entraînement ou d’une compétition sont stockés en nous (comme le carburant dans le réservoir de la voiture). C’est principalement le glycogène stocké dans les muscles (surtout les plus utilisés à l’entraînement) et, dans une moindre mesure, le foie. L’autre carburant est la graisse.

Le glycogène est le meilleur carburant, celui qui apporte le plus d’énergie par unité de temps. Malheureusement son stockage, qui dépend de l’absorption des glucides les deux ou trois derniers jours avant l’épreuve, est limité. Cependant, la quantité est normalement suffisante, même pour une longue distance comme le marathon, même la plupart du temps pour un « 100 km », à condition d’être bien entraîné et surtout de ne pas partir trop vite par rapport à son potentiel et à sa moyenne possible. En effet, la dépense de glycogène est d’autant plus importante (disons par km) que l’on court vite. Elle est aussi plus importante - à vitesse égale - au début de l’effort qu’ensuite (sa consommation diminue progressive­ment, même à vitesse égale).

A moins d’avoir négligé l’absorption des glucides les derniers jours (au moins le jour précédent), le glycogène stocké sera donc toujours suffisant, au moins pour le marathon (et à fortiori pour les distances moins longues). C’est moins sûr pour les champions sur marathon (s’ils valent, disons, moins de 2 h 40’), qui devront être particulièrement attentifs au stockage optimum de glycogène car ils en dépensent nettement plus que les autres à chaque km. L’autre carburant, utilisé en même temps, mais moins efficace car apportant moins d’énergie par unité de temps, est la graisse stockée. Il n’y a pas lieu de s’inquiéter de son stockage car celui-ci est toujours largement suffisant. Il suffit de constater la maigreur des champions pour être rassuré, même s’ils dépensent moins de graisse. Plus le coureur est capable de maintenir une allure élevée et plus la part du carburant glycogène utilisé est élevée et plus la part du carburant graisse est faible. C’est ce qui se passe tout naturellement dans l’organisme.

En résumant, on estime que, dans un marathon, le champion utilise approximativement (cela dépend aussi de son poids) 400 à 500 g de glycogène et 150 à 200 g de graisse, alors que les coureurs valant, disons 3 h et plus, utilisent plutôt 200 à 300 g de glycogène et 250 à 350 g de graisse. Vous voyez que, quel que soit votre niveau, vous avez suffisamment de graisse, même si vous êtes maigre, même si votre graisse n’est pas du tout apparente. A noter que quels que soient les aliments absorbés - s’il s’agit de glucides - dans les deux ou trois derniers jours avant l’épreuve le stockage de glycogène sera le même. Rappelons que les aliments courants les plus riches en glucides sont le pain, les pâtes, le riz, les féculents en général, les fruits et boissons sucrées, le sucre...

Évidemment, c’est l’affaire des marchands de produits « dits » énergétiques de nous faire croire que ce qu’ils nous proposent dans leurs boîtes, sachets... se stockent mieux et en plus grande quantité en glycogène. Mais c’est faux. C’est ni mieux, ni moins bien ; c’est la même chose... sauf que c’est plus coûteux. Il y a même des petits malins qui, surfant sur la croyance que les pâtes se stockeraient mieux en glycogène que les autres aliments glucidiques (en réalité c’est la même chose), proposent des... pâtes liquides ! Sans doute pour ceux qui n’auraient plus de dents et seraient incapables de mâcher ! On croit rêver. On pourrait imaginer qu’il suffit de prendre des aliments glucidiques en cours d’épreuve pour être certain d’avoir toujours suffisamment de glycogène. Non seulement cela ne servirait à rien d’avoir du glycogène en excès dans une épreuve de durée, disons, classique, mais surtout parce que les organes de digestion ne sont pas efficients lors d’un effort de course à pied (en particulier lorsqu’il est intense comme dans une compétition).

Cette inefficacité des organes de digestion est moins flagrante dans d’autres sports comme le cyclisme, le ski de fond ou bien si l’effort est beaucoup moins intense comme les épreuves de grand fond, largement au-dessus de 12 h, ou s’il s’agit de marche, de randonnée...

Alors, si glycogène et graisse sont à peu près les seuls carburants utilisés lors d’un effort et que le stockage est suffisant, pourquoi est-il tout de même nécessaire de prendre autre chose pendant l’effort ?

Parce que les cellules nerveuses ont aussi besoin d’un carburant dont la source est différente. Elles ne peuvent tirer leur énergie, leur carburant, dont elles ont un besoin impératif, que du glucose du sang et rien d’autre.

Si le taux de glucose du sang (ou glycémie) descend trop bas cela amène une très nette diminution des capacités, voire un effondrement total, l’incapacité de fournir un effort efficace, même si, par ailleurs, il reste suffisamment de glycogène.

Lorsque l’effort se prolonge la glycémie a tendance à baisser, plus ou moins tôt selon les individus certes, mais de façon quasi-certaine lors d’une épreuve comme le marathon. Sans moyens permettant de maintenir un taux de glucose correct - comme nous allons le voir - presque personne, champions ou non, ne pourrait tenir tout un marathon sans connaître l’hypoglycémie, donc une défaillance sévère, vers le 30e (ou nettement avant) ou tout au plus 35e km. Pour maintenir un taux de glucose du sang correct, normal, il est nécessaire d’absorber des glucides pendant l’effort si celui-ci dépasse, disons 1 h 15’. Le problème c’est que, comme nous l’avons vu, lors d’un effort exigeant, éprouvant, comme c’est le cas lors d’une compéti­tion, en particulier dans un sport non porté, avec les pressions et les chocs, comme en course à pied, les organes de digestion fonctionnent au ralenti, sont peu efficaces. Les glucides les plus digestes, les moins perturbants, les plus rapidement assimilables afin d’éviter une baisse de la glycémie et qui risquent le moins d’occasionner des troubles digestifs sont les glucides sous leur forme les plus simples, comme le sucre ordinaire (qu’il soit blanc ou roux n’a pas d’importance), ou tout aussi bien (mais pas mieux) le miel, les jus de fruit (sans la pulpe), les différents gels proposés éventuellement, les poudres dites énergétiques.

Tout cela, et quoi qu’en disent ceux qui vendent les gels ou poudres, a exactement la même efficacité.

Mais, et cela est absolument impératif (et je vous invite à lire et relire attentivement cette phrase, à vous en imprégner), à condition que la concentration en glucides mélangés (dissous) dans l’eau, soit faible ; à un taux d’environ 40 g par litre d’eau (voire un peu moins s’il fait chaud).

Si la concentration est plus élevée la vidange de l’estomac sera ralentie, voire bloquée. Alors l’eau stagnera dans l’estomac sans pouvoir réhydrater rapidement, les glucides ne pourront être assimilés ou trop lentement, pour maintenir une glycémie correcte ; les cellules nerveuses n’auront donc pas, ou trop peu, ou trop tardivement le seul carburant (glucose) dont elles puisent leur énergie.

De plus, des problèmes digestifs : gênes, douleurs d’estomac, sensations d’écœurement risquent fort d’handicaper le coureur. De toute façon son potentiel sera diminué car l’apport de sang aux organes de digestion se fera au détriment des muscles.

Heureusement, cette faible concentration (40 g par litre d’eau) est suffisante pour maintenir constamment un taux de glucose correct, à condition que la prise de la boisson sucrée soit régulière, tous les 5 km par exemple. C’est d’ailleurs l’espace­ment habituel, conformément à la réglementation, des postes de ravitaillement dans les compétitions. Un morceau de sucre pèse généralement cinq grammes, parfois quatre ; c’est à vérifier. Une dosette de sucre en poudre que l’on propose habituellement avec le café dans les bars pèse cinq grammes. Quarante grammes de sucre par litre d’eau sont donc apportés par huit (ou dix) morceaux de sucre ou dosettes. Cela paraît peu car le goût de sucré est très faible, mais c’est suffisant. Il ne sert à rien d’aller au-delà, qu’à risquer les effets secondaires nocifs cités plus haut.

Si c’est une poudre « dite » énergétique (en réalité des glucides tout simplement) qui est utilisée le dosage doit être le même. S’il s’agit de glucose pur il faut savoir qu’il est normal de ne pratiquement pas ressentir de goût de sucré, mais l’efficacité est la même ; il ne faut pas non plus dépasser les 40 g par litre. Ce qui compte c’est la quantité de glucides, pas le goût de sucré.

Les organisateurs qui proposent des jus de fruit font une grossière erreur en les proposant tels quels. Les jus de fruit (nous parlons des vraisjus de fruit, pas des sodas) contiennent tout naturellement environ 120 g de glucides par litre. Ils peuvent être proposés, mais à condition d’être fortement dilués. Afin de retrouver le dosage de 40 g par litre il suffit de diluer, à raison d’un tiers de jus de fruit et deux tiers d’eau.

Pour le coureur, le plus simple, le plus sûr, le mieux, est de prendre deux morceaux de sucre (ou deux dosettes de 5 g) avec de l’eau à chaque ravitaillement tous les 5 km. Il suffit de mettre d’abord le sucre dans la bouche puis de boire par dessus. Le sucre va se dissoudre tout simplement en même temps que l’on boit.

Afin d’éviter un éventuel écœurement, à la longue, du goût de sucré, il suffit de garder un peu d’eau pour finir de rincer la bouche. Puisqu’il faut absorber un minimum d’un cinquième de litre d’eau s’il fait franchement frais (un gobelet normal plein) à un bon tiers de litre (un gobelet et demi, voire deux gobelets), s’il fait chaud, le dosage correspondra tout au plus à 50 g par litre d’eau (on peut supporter un dosage un peu plus élevé s’il fait frais), si l’on ne boit qu’un gobelet. Si l’on absorbe un tiers de litre (ou légèrement plus) parce qu’il fait chaud, 10 g de sucre correspondront à un dosage de 30 g par litre. Ce sera suffisant car l’assimilation d’une boisson trop dosée se fait moins bien lorsqu’il fait chaud.

Donc, de toute façon, toujours 10 g de sucre ou autre type de glucides se diluant (en fines particules) dans l’eau, à chaque ravitaillement, y compris au premier, sans en oublier aucun. Il ne faut surtout pas attendre le début de la défaillance, de la baisse d’allure, pour s’alimenter ainsi. En effet, si vous prenez cette boisson légèrement sucrée trop tard, lorsque vous sentez venir la baisse de régime, vos organes de digestion seront encore plus longs à assimiler eau et glucides que vous leur apportez. Le délai minimum d’environ 15 minutes entre l’absorption de sucre et l’assimilation pour assurer une glycémie correcte sera augmenté. Vous serez contraint, pendant tout ce laps de temps, de très nettement ralentir, peut-être marcher tant l’effort est pénible, presque impossible en cas d’hypoglycémie nette. Vos jambes vont s’engourdir, avec la sensation d’une impossibilité de vous mouvoir. Même si vous finissez par pouvoir repartir à peu près normalement votre enthousiasme et votre moral seront certainement au plus bas.

Pour sa prestation optimale le coureur n’a besoin de rien d’autre : aucun aliment solide : ni raisins secs, ni quartiers d’orange, ni banane, rien ; la pulpe étant, dans les conditions de course, déjà un frein pour une vidange rapide de l’estomac.

Et cela, seulement cela,jusqu’à une durée totale... d’au moins 12 h ! Il paraît toujours étonnant, incroyable, dans nos sociétés d’abondance où l’on a toujours peur de manquer de force, d’énergie, que l’idéal est de se contenter d’eau et de sucre dans des compétitions éprouvantes aussi longues. Vous pouvez utiliser les gels... si vous préférez dépenser davantage : environ 10 euros pour sept gels dans un marathon - sept ravitaillements si on néglige le huitième - au lieu de 14 sucres, soit 70 g, donc environ 0,10 euros. Cent fois moins !

Mais si vous choisissez les gels il faut vous assurer que vous prenez bien environ 10 g de glucides et non 18 g comme en contiennent - parfois plus - la plupart des gels. Un tube de gel (contenant 18 g de glucides) avec un cinquième de litre correspond à un dosage de 90 g par litre - 72 g l’on absorbe un quart de litre - 54 g si l’on absorbe un tiers de litre (parce qu’il fait chaud). C’est beaucoup trop. Il faudrait ne prendre que la moitié d’un gel. Que ferez-vous du reste ? Si c’est un gel qui se déchire vous ne pouvez pas le garder entamé, vous devrez le jeter.

En prenant vos sucres vous n’avez besoin que de 6 sucres (30 g) pour un « 20 km », 14 sucres (70 g) pour un marathon. il vous suffit de les prévoir dans une poche, dans un sac plastique, pour les protéger de l’humidité, si vous n’êtes pas sûr d’en trouver aux postes de ravitaillement.

Pour celui qui prendrait la totalité d’un gel avec une boisson déjà sucrée (à 40 g par litre), la concentration serait de 90 à 130 g par litre ! Et si vous prenez un gel avec seulement 0,1 1 d’eau comme c’est - curieusement - parfois conseillé par les fabricants dans le mode d’emploi, cela fait 180 g par litre ! Et si vous prenez encore des aliments solides par là-dessus (!) on comprend la litanie de plaintes digestives et autres dans les marathons.

Oui, je sais les arguments que l’on va m’opposer : les gels contiennent différents types de glucides, assimilés plus ou moins rapidement selon que l’on veut un effet étalé dans le temps ou un coup de fouet (sic) ou un supplément d’énergie pour le sprint final (resic).

Il est vrai que les glucides peuvent, selon leur composition, être assimilés avec une « petite » différence de rapidité... si l’on est au repos. Mais dans le cas d’un effort, surtout dans le cas d’une compétition de course à pied, les choses ne se passent pas du tout de la même façon. Il est vraiment hasardeux de prétendre que tel glucide (sucre - miel - tel ou tel type de gel) s’assimile plus rapidement qu’un autre pour remonter une glycémie défaillante.

Jamais, au grand jamais, il ne peut y avoir un effet coup de fouet (!), à part un éventuel très fugitif effet placebo si l’on y croit.

Le seul coup de fouet possible (relatif - n’exagérons rien -disons retour rapide à une glycémie normale) serait... une piqûre de glucose directement dans une veine (j’espère que l’on ne va pas en arriver là !).

De toute façon, et là on se rend compte à quel point les fabricants de gels se fichent de nous et nous racontent des salades, les glucides de ces gels sont tous... du sirop de glucose ! Qu’il soit indiqué sur le tube « Gel endurance effort long » - « Gel coup de fouet, énergie instantanée » - « Gel efforts extrêmes Sprint Air ! » (bravo l’imagination), c’est le même type de glucides qui est à l’intérieur. Je ne pense tout de même pas que les formules sorties de l’imagination des pros de la publicité traversent l’emballage pour donner des propriétés différentes aux mêmes types de glucides ! Et même si, parfois, le type de glucides est quelque peu différent, cela ne change quasiment rien quant à la rapidité de l’assimilation dans le cadre d’un effort de compétition.

e voudrais bien voir un vendeur, représentant, fabricant de ces gels oser sortir son argumentaire devant un vrai scientifique. Nul doute que celui-ci écouterait avec un sourire moqueur, ironique ou s’esclafferait tout simplement. Un autre argument, encore plus farfelu, est que ces gels contiennent des vitamines, sels minéraux, anti-radicaux libres, antioxydants... On ne précise pas évidemment que c’est en quantité infinitésimale. Mais peu importe, car il n’y a de toute façon pas le moindre intérêt à prendre ces éléments en compétition. Ni intérêt ni inconvénient d’ailleurs.

Nos réserves et (ou) l’intérêt des vitamines, sels minéraux, oligo-éléments, anti-radicaux libres tiennent à notre alimentation les semaines, mois, voire années précédentes. En prendre ponctuellement en plus d’une alimentation normale ne sert à rien. Ces substances sont dans de très nombreux aliments : fruits, légumes, produits animaux, laitages, poisson, œufs, etc., même dans le café, le thé, etc. Ils y sont beaucoup plus diversifiés (il y a par exemple des milliers d’anti-radicaux différents), bien mieux assimilés et éventuellement bénéfiques si on les absorbe ainsi sur une longue période (mois-années). En prendre spécifiquement avant ou pendant une compé­tition pour soi-disant être plus performant, éviter tel problème, des crampes, de l’acide lactique !, mieux récupérer, est totalement inepte, n’a aucune justification, aucun sens. Les scientifiques, les vrais (pas les soit-disant inventés par la marque) sont d’ailleurs extrêmement prudents quant à la nécessité, les effets, les bénéfices et les inconvé­nients éventuels des anti-radicaux libres, même pris dans des conditions normales et sur une longue période.

Il n’y a que les publicitaires qui ne doutent de rien et qui nous abreuvent, nous accablent, d’apparentes certitudes qui sont des insultes à la mesure, à la prudence, à l’intelligence, à l’honnêteté. La meilleure preuve de ce quej’avance c’est qu’aucune de ces marques, diffuseurs de ces gels, qui leur attribuent des propriétés hors de la réalité ne prendra le risque de, par exemple, porter plainte pour diffamation. Je suis parfaitement serein. Tiens, je reçois justement le catalogue de la marque sans doute la plus connue. Je ne résiste pas à reproduire un petit passage sur les fameux gels (pour faire une petite pub’ gratuite !). Quelques produits utilisés sur le parcours (d’un mara­thon) : C’est très rigolo. Les parenthèses en italique sont mes com­mentaires. —... 4 ENERGIX (ah ! le bien nommé !) sur le parcours (au 5, 15, 25, 30e km) donne une énergie régulière (bon, si l’on veut, mais 18 g à chaque fois c’est trop), 1 gel ANTIOXYDANT à mi-parcours permet de lutter contre l’apparition de perturba­tions musculaires (qu’un gel antioxydant puisse avoir un effet aussi rapide alors que les scientifiques à l’issue de plusieurs années de supplémentations avec des milliers de volontaires restent dubitatifs !.... là on est en plein délire) et des gels à action rapide comme le COUP DE FOUET (félicitations à celui qui un jour, dans son bureau, a trouvé, dans un éclair de génie, cette appellation au brillant avenir !) et le RED TONIC Sprint Air fournissent une énergie puissante et instantanée pour les derniers kilomètres (puissante et instantanée : diable, dépassée même la piqûre de glucose directement dans la veine !). Le RED TONIC Sprint Air est hyper-rafraîchissant (on en apprend tous les jours ; je ne savais pas qu’absorber 18 g de glucose pouvait être rafraîchissant !) et ça redonne une bouffée d’air frais (ça a le pouvoir d’éliminer la chaleur du corps ou c’est juste une expression poétique ?).

Ah, le pouvoir magique des mots ! Promettez, promettez, il en restera toujours quelque chose. Astérix et la potion magique, l’imposition des mains et la guérison des écrouelles, le coureur et son gel antioxydant, son coup de fouet, son Red tonic sprint air ; si l’on ne peut plus rêver ! Si un champion, populaire et très connu, et bien sympathique, quatre fois champion de France du marathon, troisième au championnat d’Europe vante, comme je l’ai entendu dans le reportage télé d’un marathon, la supériorité des gels par rapport à une simple boisson (légèrement sucrée), demandez-vous d’abord s’il n’aurait pas quelque intérêt financier, s’il ne renvoie pas l’ascenseur à telle ou telle marque généreuse. Enfin i . e n’en sais rien ; à moins qu’il ne soit simplement aussi crédule qu’il a été talentueux. En tout cas, c’est un très bon ambassadeur des marques proposant des gels (et autres produits). Comme ça m’étonne­rait tout de même beaucoup qu’avec son expérience, sa longue carrière, il soit resté un « gogo » gobant le premier baratin venu, je lui accorderais le don de savoir répéter des bobards avec de remarquables accents de sincérité. Manifestement, il est très doué pour se faire l’écho d’élucubra­tions pseudo-scientifiques ; les marques vont se le disputer. Il ne se rend pas compte à quel point ces quelques phrases auront eu un impact sur les auditeurs (quelques secondes j’ai moi-même failli y croire !). Il devrait augmenter ses exigences. Sa reconversion dans la pub’ est assurée. Tant mieux, ce n’est pas si fréquent chez les champions. Ah, tiens, justement, je viens de recevoir le copieux catalogue de la marque OVERSTIM, apparemment leader en ce domaine (catalogue intitulé « NUTRITION SPORTIVE ! » -Pourquoi se gêner ?), où je vois qu’il fait partie des « champions - sandwiches », interviewés si l’on peut dire (peut-on appeler interview des questions-réponses programmées et télécom­mandées). Qu’est-ce qu’il doit regretter de n’avoir pu bénéficier de ces produits merveilleux lorsqu’il était en pleine activité !

Le dernier repas avant la compétition... et autres GASTOSPORT, GATEAU ENERGIE...

RAPPEL :

Au départ d’une compétition l’estomac doit être totalement vide d’aliment. Pour cela, le dernier repas doit être digeste et pris suffisamment longtemps à l’avance. Il doit être plutôt léger car, normalement, le stockage du glycogène dans les muscles aura été assuré en augmentant la part des aliments glucidiques (pain, pâtes, riz, pommes de terre, féculents divers, boisson sucrée type jus de fruit éventuellement...) le jour avant l’épreuve (les 2 ou 3 derniers jours en vue d’une épreuve longue). Ce stock n’est pas entamé par la durée d’une nuit - même agi­tée si le stress empêche de trouver le sommeil - puisque l’on ne fait pas d’effort intense (le glycogène est le carburant fournissant prioritairement l’énergie lors d’un effort intense).

Par contre, le glycogène stocké dans le foie (en quantité quatre à six fois moindre que dans les muscles) est utilisé, en priorité pour assurer un taux de glucose (glycémie) correct dans le sang, seule énergie des cellules nerveuses qui en ont un besoin constant, même au repos. Il est donc conseillé de prendre un dernier repas, plutôt glucidique, le jour de l’épreuve. L’absorption de 100 g de glucides est largement suffisant, ce qui correspond à environ 100 g de pâtes ou de riz (pesés crus-), soit environ 250 g pesés cuits (la différence de poids étant évidemment l’eau rentrée dans les pâtes pendant la cuisson) ou 150 g de pain.

Si l’on a mangé tard la veille au soir et que le départ est tôt le matin il n’est pas forcément nécessaire de remanger si le délai entre le dernier repas et le départ ne dépasse pas 7 à 8 h. Le délai peut même être plus long pour certains, mais cela dépend des individus. L’expérience montre qu’il est préférable, pour la plupart, de faire un dernier repas avant l’épreuve. Si le dernier repas n’est composé que de glucides il y a le risque (très variable selon les individus) d’une élévation trop rapide de la glycémie suivie, plus ou moins longtemps (et longue­ment) après par une hypoglycémie (taux de glucose dans le sang trop bas). Dans ce cas on se sent sans énergie, la tête un peu vide ; les capacités de performance sont alors fortement diminuées. Pour remonter la glycémie il faudra prendre alors 10 à 15 g de sucre (la glycémie remonte en 15 minutes environ). Ce phénomène d’hypoglycémie est aussi, semble-t-il, accentué par le stress.

Le risque d’hypoglycémie réactionnelle à une hyperglycémie est fortement accentué si l’on prend des glucides dits « rapides » (ceux qui élèvent le plus rapidement la glycémie tels le sucre, donc la confiture, le miel, les boissons sucrées, le pain d’épice...). La cuisson des pâtes ou du riz a aussi une légère influence. Des pâtes très cuites augmentent un peu plus vite la glycémie et se comportent un peu comme (pas tout à fait tout de même) comme des sucres rapides, par rapport à des pâtes « al dente » (cuites juste ce qu’il faut). A noter que le phénomène d’hyper puis d’hypoglycémie réactionnelle ne se produit pas si les glucides (sucre par exemple) sont pris lors d’un effort. Dans ce cas, la glycémie sera maintenue ou remontée au taux normal, sans plus. Là encore, ce qui se asse lors d’un effort est quelque peu différent de ce qui se passe lorsque l’on est au repos.

Le fait de prendre au dernier repas un aliment protidique (comportant même un peu de lipides), tel un œuf à la coque (voire deux) ou une tranche de jambon blanc de 50 à 100 g (en enlevant le gras apparent) empêchera l’élévation excessive de la glycémie.

Glucides, comme nous l’avons indiqué, et un de ces aliments protidiques composent un repas sans risque et digeste. Un délai de trois heures est généralement préconisé entre la fin de ce dernier repas et le départ. C’est un minimum. Nous conseillons plutôt 4 ou 5 heures. C’est le délai normal de la vidange totale de l’estomac des aliments solides. Délai qui serait même fortement allongé, jusqu’à 7 ou 8 h, voire plus, en cas d’aliments moins digestes : viandes grasses, sauces grasses, poissons très gras, fritures, charcuteries grasses, ail... Il faut aussi se rappeler que le stress a, là aussi, une influence sur tous ces phénomènes ; la digestion peut en être ralentie.

Les impératifs sont donc les suivants :

- Prise d’aliments glucidiques (en évitant les rapides : sucre, miel...).
- Aliment protidique (pas trop gras) afin de limiter le risque d’hyper puis d’hypoglycémie réactionnelle.
- Délai suffisant entre la fin du repas et le départ (nous conseillons 4 à 5 heures c’est plus sûr).

Ce repas peut donc être tout simple, comme un petit-déjeuner succinct :
- Pain (environ 100 g) avec un tout petit peu de beurre (environ 20 g). Il vaudra mieux éviter la confiture ce jour-là.
- Un œuf à la coque. A part cela ne cherchez pas un aliment miracle qui aurait le pouvoir miraculeux de vous permettre de réaliser un peu mieux que ce que vous valez ; il n ’y en a pas.

Vous pouvez, si vous voulez, prendre un yaourt et (ou) un fruit (bien mûr), mais ce n’est pas indispensable.

Bien sûr ne cédez pas à la tentation, si vous êtes à l’hôtel, de prendre des croissants, ni des aliments inhabituels. Ce n’est pas le moment. Vous vous rattraperez si vous le voulez le lende­main matin.

Que ce repas soit riche ou non en vitamines, sels minéraux, oligo-éléments, antioxydants (sic), etc., n’a aucune importance (salez normalement si vous ne prenez pas du pain - il y a du sel dans la fabrication du pain). Nous avons déjà vu que ce qui compte c’est ce qui est apporté par l’alimentation par les semaines, mois, années précédents. La richesse ou non de ces éléments lors du dernier repas ne change rien. Il n’y a que deux choses utiles : refaire un peu les réserves de glycogène du foie, éviter l’hypoglycémie réactionnelle. Et s’il semble, peut-être, que prendre des protides puisse comporter certains autres avantages, et bien, de toute façon, là vous les avez. Ainsi le blanc d’oeuf (coagulé, donc cuit afin d’être bien assimilé) est l’aliment parfait au point de vue équilibre des acides aminés, composant des protides. Inutile non plus d’acheter des « acides aminés dits ramifiés ». Ils sont dans le blanc d’oeuf en quantité optimum !

Les produits tels « GATEAU SPORT » GATEAU ENERGIE... peuvent-ils convenir pour remplacer un repas d’avant-compétition tel que celui que nous préconisons ci-dessus ?

La réponse est... OUI. Voilà qui va faire plaisir au fabricant. Ce n’est certes pas une préparation que l’on peut conseiller dans une alimentation normale, dite équilibrée mais pour un repas d’avant-course il n’y a pas de problème. Il y a les glucides nécessaires, des lipides en quantité convenable (et des protides) afin d’éviter l’hypoglycémie réactionnelle. La fabrication est on ne peut plus simple : il suffit de verser le contenu de la boîte (400 g) dans un récipient, de mélanger avec un quart de litre d’eau, de verser dans un moule (prévoir que la pâte va gonfler de son double du volume de départ) ; de mettre au four 30 à 35 minutes.Il ne faut pas tout manger, c’est beaucoup trop. Un tiers est largement suffisant. Le reste se conserve jusqu’à 4 jours à température ambiante. On peut aussi le mettre au congélateur pour d’autres occasions.

C’est, gustativement, ni bon ni mauvais. Même sans être spécialement gourmet on n’aurait pas idée d’en faire son dessert habituel, même si l’appellation « GÂTEAU »... peut le laisser penser. Moi je préfère prendre le petit-déjeuner préconisé plus haut ou, pourquoi pas, selon les circonstances, du riz préparé à l’avance avec un oeuf dur coupé dedans.

Vous... c’est vous qui voyez, mais ça m’étonnerait que le goût vous enthousiaste. Il est vrai qu’avant une compétition c’est l’aspect pratique qui prime. Après la course il faudrait que vous soyez un peu affamé et privé d’autre chose pour vous jeter sur les deux tiers restants.

Avec GATOSPORT... vous ne réaliserez pas une seconde de mieux que ce que vous valez, vous n’améliorerez pas votre potentiel. Mais il n’y a pas de raison non plus que vous réalisiez une seconde moins bien qu’en prenant une alimentation plus classique telle que nous l’avons indiquée.

Il n’est pas toujours facile d’avoir à sa disposition un repas dit normal si on ne l’a pas pensé avant, lorsque l’on fait une compétition loin de chez soi. Alors le GATOSPORT c’est pratique, d’accord. De plus, ce n ’est pas spécialement coûteux. On le sort du sac... et plus de question à se poser. Mangez-le tout de même lentement, en mâchant bien, la digestion en sera facilitée. Quatre heures seront suffisantes pour que la digestion soit totalement terminée au moment du départ.

Bon, ce n’est pas fini. Vous vous doutez bien que si je parle de GATEAUSPORT’ (ou autres présentations du même genre) dans un livre sur les « Bobards que l’on nous raconte », c’est qu’il doit y avoir un bobard quelque part dans l’argumentaire du fabricant ou de ceux qui ont conçu le texte figurant sur l’étiquette collée sur la boîte, sur les prospectus, sur les pub’ dans les revues.

L’argument massu, celui qui déclenchera le geste d’achat, qui vous le fera préférer à votre repas normal, le bobard en réalité, est que ce produit est censé pouvoir être ingéré jusqu’à 1 heure avant le départ alors qu’un repas normal, même digeste, a besoin de 3 heures.

l est vrai que ce type de produit, ingéré même seulement une heure avant le départ, n’occasionnera pas d’inconfort, pas de gêne apparente au moment du départ. Mais cela n’est pas du tout l’indice que la digestion sera totalement terminée, que l’estomac sera vide.

De la même façon, un repas digeste tel que nous l’avons préconisé n’occasionnerait pas non plus, s’il était ingéré une heure avant le départ, d’inconfort ou de gêne apparente au moment du départ.

GATEAUSPORT ou repas demande également au moins 3 heures (minimum - plutôt 4 ou 5) pour ne plus du tout encombrer l’estomac. L’absence d’inconfort ou de gêne n’étant pas des indications suffisantes. L’estomac n’étant pas vide, les conséquences vont se manifes­ter à l’effort pendant l’épreuve. Dans le meilleur des cas, et selon les individus, il se peut que cela ne se manifeste pas par des inconforts ou douleurs digestives trop flagrantes, mais le potentiel sera forcément plus ou moins diminué, pour différentes raisons :

parce que l’apport de sang vers les organes de digestion se fera au détriment des muscles ; parce que la fréquence cardiaque à allure égale sera un peu plus élevée ; parce que le fait d’avoir des aliments dans l’estomac empêche (lors d’une compétition de course à pied), ou ralenti, le passage de l’eau absorbée de l’estomac à tout l’organisme, donc limite la capacité d’hydratation afin de remplacer les pertes ; parce que même le maintien de la bonne glycémie ne sera pas forcément assuré si la boisson reste dans l’estomac. Si, l’épreuve étant courte, disons &une durée de moins de 50 minutes, et que l’on n’a pas besoin de boire, il n’y a pas ces problèmes d’augmentation de l’encombrement dans l’estomac. Pourtant il restera une nette diminution des capacités en raison de l’apport de sang vers les organes digestifs au détriment des muscles. Vous ne vous en rendez pas forcément compte si vous ne ressentez pas de gêne, mais vos capacités sont tout de même fortement diminuées.

GATEAU-SPORT, OVERSTIM... ont réussi à vous vendre leur(s) produit(s). C’est bon pour leur commerce ; ils s’en contre-fichent que cela ait handicapé votre potentiel !

Si l’épreuve est longue et impose de devoir prendre des boissons sucrées lors des ravitaillements elles resteront donc dans l’estomac sans pouvoir (ou avec difficulté ou trop lente­ment) être utilisables, augmentant l’inconfort, occasionnant presque inévitablement des douleurs digestives ou nausées, à l’extrême des vomissements. Et si, facteur aggravant, l’on prend des gels sous une forme trop concentrée (au-delà du dosage de 40 g par litre d’eau) ou une boisson énergétique trop dosée, vous avez là toutes les erreurs les plus flagrantes, les plus fréquentes, chez les coureurs.

GATOSPORT ou autre aliment, absorbé trop tard, concentra­tion trop élevée de glucides pendant l’effort (ou prise de glucides sans absorption d’eau), prise d’aliments solides, vous avez là le mélange détonant dont les conséquences sont tous les problèmes digestifs que l’on constate si souvent dans les épreuves, quelles que soient les distances mais surtout les plus longues y compris les traits.

Ce n’est pas parce que l’on fait un trail qu’il est nécessaire, ni même judicieux, de stocker dans son harnachement quantité de gels, barres, cachets de ceci ou de cela. Même pour un trail de plusieurs heures (jusqu’à une douzaine d’heures), des morceaux de sucre et de l’eau sont l’optimum pour exprimer le meilleur de votre potentiel.

C’est la même chose pendant les courses de Raids par étapes. Entre chaque étape seulement il faudra refaire les réserves de glycogène en privilégiant l’absorption de glucides. Et nous vous rappelons encore une fois que le pain, les pâtes, la semoule, le tapioca, le riz, les pommes de terre, les féculents en général, les jus de fruit éventuellement feront parfaitement l’affaire.

D’accord, je me répète ; il le faut bien pour estomper le bourrage de crâne des experts de la... nutrition sportive alambiquée. Inutile d’absorber des... pâtes liquides, des boissons énergétiques à haute performance réhydratante (mieux que de l’eau ?) enrichies (sic) en éléments réhydratante (mieux que de l’eau ?) enrichies (sic) en éléments antioxydants empêchant la dégradation musculaire et les crampes... !

A t-on jamais vu un représentant de ces produits miracles oser faire une conférence pour les mettre en avant devant un parterre de diététiciens, de médecins, de professeurs d’éducation physique et autres personnes averties à qui il ne faut pas trop raconter des sornettes ? Chiche !

Source : "LES BOBARDS QUE L’ON VOUS RACONTE" de S.COTTEREAU